L’Aikido et l’absence de sponsoring ?
Vers une évolution de la situation
Le sponsor est ainsi défini par le Larousse : Particulier ou entreprise qui finance une manifestation, une épreuve sportive, culturelle — ou un de ses participants — dans un but publicitaire. Larousse en ligne.
Soyons clairs, l’objectif du sponsoring est de gagner de l’argent. Les marques espèrent obtenir une certaine visibilité pour un retour sur investissement plus ou moins rapide. Alors pourquoi l’Aikido manque-t-il si cruellement de sponsors ? Alors que nous nous lançons dans un partenariat de soutien au 5e Aiki Taikai et à la 8e Nuit des Arts Martiaux traditionnels, c'est l'occasion de s'attarder sur le sujet.
Quelles raisons ?
Cela tient probablement en deux points très simples. L’aïkido n’a pas de compétition et il n’existe presque aucun produit spécifiquement développé pour l’Aïkido. Qui voudrait investir dans des évènements rassemblant quelques dizaines voire quelques centaines de personnes maximums pour proposer des produits plus ou moins (et souvent moins que plus) adaptés à l’Aikido ?
Réponse : personne.
Si le Kendo, le Judo ou dans une moindre mesure le Karate brassent des quantités d’argent importantes, le matériel d’Aikido n’est pas un domaine très lucratif. La production n’atteint pas de grosse quantité et les couts de fabrications sont élevés. Il existe très peu de spécialistes du matériel d’Aikido et aucun d’entre eux n’a vraiment les moyens de faire du sponsoring.
BudoExport/Seido ne fait pas exception. Toujours dans cette même logique de franchise, nous n’avons pas grand-chose à y gagner d'un point de vue commercial. Alors, pourquoi « sponsoriser » le « All Japan Aikido » ou la Nuit des Arts Martiaux Traditionnels (NAMT) et l’Aiki Taikai qui l’accompagne ? Parce que nous n’envisageons pas cela comme du sponsoring.
Pourquoi souhaitons nous nous investir ?
BudoExport/Seido existe depuis un peu plus de quatre ans. C’est une petite entreprise qui fonctionne à moindre cout, mais avec des standards de qualité élevés tant sur les produits que sur les services. Grâce au relatif succès de la boutique et parce que nous sommes tous des Aikidoka, nous avons pu nous concentrer sur la création d’équipement d’Aikido. Certains reprenant ce qui existait déjà, d’autres totalement nouveau et cette démarche, bien que couteuse, semble être appréciée des pratiquants et c’était bien là l’objectif !
La capacité de production des artisans avec lesquels nous travaillons reste limitée et Seido, quel que soit son succès, ne sera jamais une marque comparable aux grandes marques de Kendo, de Judo ou de Karate. Il est cependant capital pour nous de nous concentrer sur ce dont ont besoin les pratiquants d’Aikido. Ce dont ils ont réellement besoin et non pas uniquement ce que certains décident de leur proposer.
Cette démarche ne nous est pas apparue suffisante pour venir en aide à la communauté de pratiquants, alors nous avons réfléchi à d’autres modes d’action. Notre capacité de production étant limitée, nous avons divisé par 2 notre budget publicitaire, et nous avons créé un budget donation/sponsoring en espérant trouver des évènements qui manquent cruellement de soutien dans le monde de l’Aikido.
Les évènements que nous soutenons
Prenons le « All Japan Aikido ». C’est un évènement qui rassemble environ 7000 pratiquants et très peu de spectateurs. Il n’est retransmis sur aucune chaine de télévision et les « sponsors » appelés très correctement « donateurs » n’ont le droit de citer que dans une liste de centaines de noms à la fin du fascicule distribué aux participants lors de la démonstration. Certes, Seido dispose d’un stand lors de l’évènement. Cependant, le stand est loué au propriétaire de la salle, le Nippon Budokan, et l’organisateur, la fondation Aikikai ne touche aucun pourcentage.
Par ailleurs, Seido dispose du logo Aikikai, accordé à titre gratuit, et gage de confiance des enseignants du Hombu dojo.
À aucun moment donc il ne s’agit d’une relation de sponsor puisque l’Aikikai ne demande rien en contrepartie, que ce soit pour le logo ou le stand au « All Japan Aikido ». On comprend alors que le soutien que l’on apporte à l’Aikikai se définit plus par un statut de « donation » que de « sponsoring ». C’est d’ailleurs de cette manière que cela est déclaré aux impôts.
Concernant la NAMT et le Taikai, c’est un peu différent. Léo Tamaki m’a contacté il y a quelques mois pour me proposer un espace publicitaire dans le magazine Dragon spécial Aikido. Nous savons par expérience que les retours sont assez faibles sur ce type de publicité, mais nous n’avons pourtant pas hésité une seconde. Ce magazine est une nécessité pour le monde de l’Aikido. La parole est donnée à la fois aux enseignants connus, mais également à des pratiquants beaucoup moins connus faisant un travail de recherche et de réflexion qui mérite d’être publié et partagé. Ne jouons pas sur les mots, nous y avons bien une publicité, mais le facteur déterminant n’était pas de faire de la pub, c’était de soutenir financièrement un projet que nous estimons en valoir le coup.
Dans la même logique, nos discussions avec Léo nous ont menés à un éventuel soutien de l’ensemble NAMT/Taikai.
Je ne vous le cache pas, là, nous avons hésité. La NAMT ne concerne pas que l’Aikido, et si j’avais voulu y assister au moins une fois, je n’en aurais jamais eu l’occasion. Le théâtre de la Madeleine est un grand théâtre mais n'a rien de comparable aux complexes sportifs et le public touché sera nécessairement limité. La NAMT est cependant un évènement vital dans la communauté des Budoka Français. Elle permet de mettre en avant des pratiques souvent peu connues, dans une ambiance sobre et respectueuse des traditions où la voie martiale/artistique n’est pas corrompue par le show et le spectaculaire. Nous sommes heureux et fiers de pouvoir soutenir un évènement d’une telle qualité artistique.
De son coté, le Taikai est, à ma connaissance, une opportunité unique au monde pour les pratiquants de Budo, et ce par sa diversité et l’espace de travail proposé. Comment pourrions-nous refuser de soutenir un évènement d’une telle richesse pour l’ensemble d’entre nous ?
Enfin, nous supportons également, dans une moindre mesure, l'"Association francophone d'aïkido (A.F.A)" (Belgique). Dans la même logique que pour le magazine Dragon, la fédération Belge édite un magazine 3 à 4 fois par an, à destination de ses membres. Articles de forme et de fond, parole donnée à des enseignants plus ou moins connus, c'est un magazine bien conçu et offert à titre gratuit à tous les pratiquants. Nous y avons un encart publicitaire dont les grains contribuent (très modestement) au fonctionnement de la fédération. La fédération Belge a fait énormément d'efforts pour proposer un site internet moderne, un magazine de qualité, de nombreux stages très bien organisés et avec beaucoup d'experts et ce malgré un nombre de pratiquant très inférieur à la France. L'organisation de ce groupe d'Aikido est exemplaire et nous sommes très heureux de pouvoir travailler avec eux.
Pourrons nous continuer sur cette lancée ?
Pour que cette démarche soit pérenne et forme un cercle vertueux, un certain retour sur investissement nous garantissant la stabilité de notre budget sponsoring/donation. La NAMT ne sera pas le seul évènement que nous soutiendrons, en revanche, ne vous donnez pas la peine de nous contacter pour faire de la simple publicité, nous refuserons systématiquement ce type d’offre.
BudoExport/Seido sponsorisera uniquement des évènements ayant une valeur ajoutée importante pour la communauté des Budoka, et ce à condition que l’évènement en question soit placé sous le signe de l’ouverture et de la découverte.
La relation entre business et pratique des arts martiaux peut être ambigüe. Elle ne l’est pas pour nous. Nous sommes tous pratiquants et nous pourrions tous faire un tout autre métier que le nôtre, surement plus lucratif. Mais nous aimons ce que nous faisons. Nous espérons pouvoir faire une différence, tant sur l’équipement, que via un soutien financier que personne d’autre ne pourrait ou ne souhaiterait apporter à certains évènements. Quoi qu’il en soit, nous ne sommes qu’un relai, un intermédiaire. Sans vous, rien n’est possible. Je tiens donc à terminer cet article en vous remerciant tous pour la confiance que vous nous accordez. Vous êtes là pour nous. Nous serons là pour vous.
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